La Suisse, de retour sur le podium ?
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Alors que depuis le début de l’année la bourse suisse caracole en tête des performances, enregistrant des gains de plus de 11%, talonnée par le marché européen à plus de 10%, la cote américaine, grande star de 2024 progresse timidement de 1%. Le monde bipolaire de 2024 qui félicitait sans retenue l’excellence américaine et se lamentait du déclin européen, aurait-il subi une secousse au lendemain de l’investiture de Donald Trump ? Simple opportunisme ? N’oublions pas que le marché suisse vient enfin de retrouver ses plus hauts de 2021, très en retard sur les Etats-Unis à plus de 30% de leur niveau de 2021. La Suisse qui bat à nouveau les records et monopolise les premières places en ski alpin, est-elle installée durablement sur le podium de l’excellence économique ? A en croire les récentes données de création de richesse helvétique (PIB) la croissance économique cyclique est de retour sur un rythme modéré de progression à 1.3% en 2024. Or, dans un monde 2025 de plus en plus fragmenté où les échanges internationaux et leur financement se régionalisent, où les grandes transitions tracent les trajectoires, on s’attache de plus en plus aux risques d’instabilité et à l’aptitude de résilience.
Or, l’économie helvétique a longtemps été louée pour sa compétitivité et sa structure d’activité combinant des secteurs cycliques (équipements électriques, métaux) et défensifs (chimie, pharma, alimentation et luxe), permettant une certaine résilience en période de choc conjoncturel. Depuis une décennie pourtant, l’activité productrice se concentre de plus en plus : la pharma, alimentée par les investissements en recherche et développement, se distingue. Le secteur contribue à environ 50% des exportations helvétiques et de la manufacture. On lui doit la dynamique exportatrice alors que le segment des équipements électriques stagne et le luxe, en particulier l’horlogerie et la bijouterie, progressent peu. Par ailleurs, les Etats-Unis sont devenus le premier partenaire de ces exportations, en particulier pharmaceutiques. Cette force compétitive, qui nous a maintenu sur le podium, ne pourrait-elle pas devenir source d’instabilité à l’heure où les concentrations régionale, sectorielle et des chaînes d’approvisionnement, en réponse à l’environnement de plus en plus fragmenté, accentuent la sensibilité à des règles économiques définies par un dictat unilatéral imprévisible ? Pour maintenir sa place dans le peloton de tête, la Suisse se doit de diversifier ses sources de revenus, ses industries et services et se rapprocher de ses partenaires privilégiés, c’est-à-dire de ses voisins. Ceux-ci, bien que considérés comme en retard sur les évolutions technologiques IT, développent leurs services (la performance de SAP en Allemagne en témoigne), et leur innovation dans les énergies alternatives. Comme le soulignait le rapport Draghi, la première source de compétitivité à rectifier en Europe, et la Suisse n’y fait pas exception, est l’indépendance énergétique. Le prix de la compétitivité ne passe donc pas seulement par un franc fort et une restriction budgétaire inflexible (l’Allemagne en fait les frais). Le drainage de l’épargne privée vers les investissements massifs de transition industrielle est devenu indispensable. Seul le partenariat public-privé pourra le soutenir. L’Europe s’y attèle déjà ! Quant à la Suisse, elle doit concéder à investir et à diversifier son tissu industriel pour conserver sa place sur le podium !
Rédaction le 27.02.2025